Lettre N°36 – 28 novembre 2025
Ce qui frappe dans l’organisation des COP climatiques, c’est une impression de flou. A la base, une COP est la ‘réunion de chantier’ annuelle du plus grand projet international de ce siècle, celui de la transition vers l’équilibre carbone et l’arrêt de l’émission nette de Gaz à effet de serre (GES). Pour n’importe quel chantier public ou privé de la planète, on sait répondre au moins une fois par an à quelques questions-clés qui permettent de quitter la réunion avec des idées claires sur la conduite de l’année suivante : Est-ce qu’on a avancé ou pas depuis la dernière fois ? Tient-on le rythme prévu ? Où est-on en avance et où est-on en retard ? Quelles décisions a-t-on prises pour corriger le tir ?
Nulle part on ne trouve de réponses précises à ces questions pour la dernière COP qui s’est tenue à Belém au Brésil.
– A-t-on avancé depuis la dernière fois ? Pas vraiment, puisque les émissions du principal gaz à effet de serre (le dioxyde de carbone) continuent de croitre, celles du second aussi (le méthane) et elles apparaissent de plus en plus largement sous-estimées. Mais l’organisme de suivi perçu comme légitime, le GIEC, n’a pas de mandat de suivi quantitatif (comme l’a par exemple le FMI) et dispose de moyens minuscules (une quinzaine de chargés de mission).
– Est-on en avance ou en retard sur le plan d’avancement ? Pour les initiés, la réponse est aveuglante mais elle n’est écrite nulle part. L’humanité avec l’Accord de Paris avait visé à stabiliser le dérapage en 2050 avec +1,5°. 10 ans après on voit déjà que c’est raté et de beaucoup : les +1,5° seront atteints avec 20 ans d’avance sans perspective de stabilisation.
– Où est-on en avance ou en retard ? Mystère, tant qu’on reste sur un objectif agrégé de température : une boite noire mystérieuse. Mais l’origine du problème est dans quelques réactions chimiques bien connues dont on peut suivre l’essentiel en quatre chiffres seulement : les émissions des combustibles carbonés font l’essentiel, puis les captures naturelles, l’élevage, le ciment et l’acier. Mais personne n’est chargé de centraliser ce décompte.
– Enfin, mystère aussi quant aux décisions prises pour corriger le tir. La déclaration finale insiste à juste titre sur le besoin d’en faire plus pour accompagner l’adaptation des plus faibles, mais rien n’est dit sur la nécessité d’augmenter du coup l’objectif d’adaptation annuel, ni de ce qui remplacera la cible de stabilisation en 2050 : quel est le nouvel objectif collectif de fin de chantier ?
Nous, producteurs, consommateurs, épargnants, citoyens, sommes directement concernés par le succès dans le temps de cet immense chantier. Aucun d’entre nous n’accepterait une gestion de chantier aussi déplorable pour lui ou pour les siens. Le message de cette COP reste donc celui des précédentes. Il est temps d’investir dans un suivi de chantier assis sur des mesures objectives calculées de façon indépendante. Y consacrer une fraction de l’argent dépensé donnerait de gigantesques économies, justifierait d’en dépenser plus et rendrait le succès collectif possible. Rester dans le flou rend l’échec collectif certain.
Mieux mesurer était le message de Bill Gates de notre précédente lettre (ICI) et celui de notre campagne Label Transmission : n’hésitez pas à signer l’appel ICI et à demander à vos fournisseurs, vos marques et vos banques d’afficher le contenu carbone de ce qu’ils vous proposent.
